« Si vous rentriez dans votre pays natal, quel lieu, quelles personnes, quelles ambiances aimeriez-vous retrouver ? »

Selon l’Organisation internationale pour les migrants, plus de 100 000 migrants sont arrivés en Europe en traversant la Méditerranée depuis le début de l’année 2016. C’est autant que lors du premier semestre 2015. L’arrivé de ces personnes, réfugiées pour la plupart, ravive des tensions anciennes, nourrit de nombreux mouvements d’extrême droite, et entraîne des décisions politiques contradictoires selon les pays, questionnant la notion « d’union » européenne, remettant en cause l’Europe comme terre d’accueil. La situation nous pousse à faire ressurgir, par des images, ce que le projet ENTRE avait construit, comme tentative de définition d’une identité européenne : plurielle, ouverte, en mouvement.

ENTRE est une œuvre collective réalisée en 2008 par 14 photographes, alors étudiants en photographie à l’École Nationale Supérieure Louis-Lumière, proposant autant de manières de voir l’Europe.

À l’initiative de Christian Caujolle, cette recherche vise à interroger la notion d’identité européenne par la photographie. S’il existe une « photographie européenne » en gestation, elle peut se nourrir d’une réflexion sur les territoires, les cultures et les identités qui font le continent européen.

Chaque photographe a rencontré un Européen ayant quitté son pays pour venir vivre en région parisienne. De ces échanges sont nées des commandes, les photographes ayant pour mission de rapporter à leur mandataire exilé un cliché représentant un élément, un lieu, un être cher de son pays d’origine.

Chaque photographe est devenu porte-parole d’une rencontre entre deux univers, tandis que l’exil s’inverse et qu’il devient l’étranger confronté à une autre culture le temps d’un voyage. En se posant ainsi la question du déracinement d’un Européen émigré sur son propre continent, ENTRE questionne la notion d’identité européenne par la photographie.

Dans ce contexte, nous avons choisi de ne pas seulement lier notre travail à la notion d’identité mais aussi celle de territoire, et plus particulièrement sur la façon dont la fusion culturelle s’opère lors d’un voyage en pays étranger. Ainsi, nous proposons une analyse de la fusion des cultures à l’heure de l’Union Européenne, la mutation progressive, intime, que voit naître en lui tout voyageur grâce à la photographie.

Paris fut le point de départ de ces voyages, mais aussi le commencement des prises de vue, un portrait de l’immigré commanditaire marque le début de chaque série. Pour des raisons d’unité et dans le cadre d’une réflexion sur le déplacement, le voyage s’effectua en train, moyen permettant de sentir le temps et les distances de manière plus réelle. Le photographe illustre à sa guise le chemin reliant Paris au lieu indiqué par le commanditaire.

Une grande liberté de traitement est accordée à chaque photographe. Par leurs images, chacun d’entre eux a cherché à représenter un ailleurs qui lui est méconnu. Il portera un regard sur un sujet qu’il découvre, mais que son commanditaire, lui, connaît. L’enjeu est à ce titre de confronter les représentations à une situation réelle. Chaque série d’images s’accompagne d’ailleurs d’un texte sur le ressenti du voyageur.

À l’échelle du collectif, le mélange de visions personnelles, des traitements de l’image et les éléments communs forment un discours dont l’invitation à la découverte reste la finalité, dans un aspect visuel et émotionnel. Dans cette quête de multiplication des influences, les conditions de présentations et les médias utilisés sont divers. Nous amplifions ainsi, l’idée de construction commune, de synthèse des cultures. Ces points étant tous deux au cœur du projet européen en construction.



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